La parabole des ouvriers de la onzième heure est pour Jésus une manière de nous dévoiler la surprenante comptabilité qui règne au Royaume des cieux : de quoi encore une fois nous étonner, et même nous choquer. Une vigne, un maître, des ouvriers et un contrat de travail, au moins pour les premiers. Depuis le matin, l‘embauche a commencé et le salaire fixé: une pièce d‘argent pour la journée. Et puis, les heures passant, chaque fois qu‘il rencontre des hommes désoeuvrés, le maître les embauche sans préciser le tarif. Il dit seulement : «Je vous donnerai ce qui est juste.» Vient le soir et la distribution du salaire. Voyant les derniers recevoir une pièce d‘argent, les premiers se sont mis à rêver : sûrement, leur salaire à eux serait réévalué. Mais non, ils ont reçu tout simplement ce qui avait été convenu.
Ils récriminaient contre le maître du domaine
Alors le rêve s‘est transformé en récriminations. Un mot qui dit la méfiance vis-à-vis de Dieu, chaque fois qu‘il ne nous accorde pas ce que nous désirons. Dans le désert, à l‘épreuve de la faim, de la soif, des serpents venimeux, on a beaucoup récriminé. Jésus reprend volontairement le même vocabulaire pour faire comprendre ce qui est en jeu. Ce ne sont plus ni la faim, ni la soif, ni les serpents, mais plus gravement, plus fondamentalement, la conception que nous forgeons de la justice de Dieu. «Je vous donnerai ce qui est juste », avait dit le maître. Il aurait pu dire : «Ce qui est juste à mes yeux.» Ce qui est juste à ses yeux, c‘est d‘avoir un regard bon sur tout le monde : mais cette justice-là n‘est pas toujours de notre goût. Nous ressemblons parfois à Jonas qui s‘est mis à bouder quand il a découvert justement que Dieu souhaitait le salut des Ninivites autant que celui des fils d‘Israël. Alors, il nous faut sans cesse revenir à cette phrase de Jésus qui conclut la parabole de la brebis perdue : «Votre Père qui est aux cieux veut qu‘aucun de ces petits ne se perde.» Tant que nous continuerons à calculer les mérites comparés des uns et des autres, nous entendrons résonner cette autre phrase : «Vas-tu regarder unavec un oeil mauvais parce que moi, je suis bon?» Car, après tout, les premiers embauchés n‘étaient lésés en rien : le contrat avait été respecté en ce qui les concerne. Le maître n‘a-t-il pas le droit de disposer de son bien à sa guise? Et quand il s‘agit de Dieu lui-même, dont les ressources sont inépuisables, nous n‘avons rien à craindre de ses libéralités. Sans oublier que, tout bien réfléchi, nous ressemblons tous plutôt aux ouvriers de la dernière heure ! Personne ne nous a embauchés.
Dans la vigne du Seigneur, qui pourrait soutenir cela? Alors que la Bible tout entière répercute l‘annonce extraordinaire de l‘amour de Dieu pour l‘humanité tout entière Quelle que soit l‘heure de l‘embauche, nous sommes assurés d‘être amplement rétribués.
(panorama : fiches bibliques)