« Le Seigneur est un juge qui ne fait pas de différence entre les hommes. Il ne défavorise pas le pauvre», annonce le livre de Ben Sirac aujourd’hui. Cela peut étonner les chrétiens que nous sommes. Est‑il vrai que le Seigneur est juge au sens où l’entend l’auteur de ce texte ? Notre Père des Cieux n’est pas un magistrat. «Pour ce que ça juge, un père ! » a noté un jour Péguy. En ces temps où les Hébreux pensaient que les méchants étaient punis sur cette terre et que les bons y étaient récompensés, le pauvre, malgré sa prière, n’était pas favorisé. La «force de résurrection», qui nous est donnée par l’Esprit Saint, peut seule nous faire comprendre que Dieu ne fait pas de différence entre les hommes… si nous n’en faisons pas nous‑mêmes !
Mais, dans la parabole du pharisien et du publicain, on voit bien qu’il est facile, et fréquent, de mettre une échelle de valeurs dans l’appréciation de nos proches. Distinguer les bons et les mauvais, c’est se mettre évidemment parmi les bons ! Se croire juste, mépriser les autres, c’est imaginer le monde en noir et blanc, tout bon ou tout mauvais. En réalité, tout homme est pécheur, et en tout homme, il y a une part bonne.Au plus profond de chacun, l’Esprit Saint est à l’action.
Le Pharisien parle de lui : «Je te rends grâces…» Le publicain parle de Dieu «Prends pitié…» Pourquoi nous est‑il si difficile, dans la prière, de contempler Dieu plutôt que de parler de nous, de nos petits Problèmes ? La prière gratuite est celle qui demande pour nous, non une faveur mais l’Esprit Saint. La prière gratuite est celle qui se réjouit de l’amour du Père, et qui l’en remercie.
Ne juger personne, c’est aussi ne pas juger le pharisien !
Saint Paul, dans sa 2ème lettre à Timothée, manque‑t‑il un peu de modestie ? Sans doute. Mais son assurance d’entrer dans le Royaume de l’au‑delà nous est précieuse. Car elle vaut pour chacun des fidèles que nous essayons d’être. Et quoi qu’en disent ceux qui ne sont pas à la veille du passage par la mort, cette espérance est réconfortante… elle est même le seul réconfort.
«Je me suis bien battu», dit encore l’apôtre Paul. Le vocabulaire guerrier n’est plus le nôtre. Mais puissions‑nous être, comme lui, en lutte, non contre des personnes ou des groupes, mais contre le mal et le malheur des hommes.